3 questions à Rémi Vallet

Rémi Vallet est Directeur mécénat, philantropie et legs à l'Association des Paralysés de France

Pour l’APF, quelles sont les priorités d’actions pour permettre la mise en œuvre d’une société réellement inclusive ?

Notre priorité, c’est de faire évoluer l’environnement des personnes en situation de handicap pour leur permettre d’être acteurs de leur parcours de vie au travers d’un environnement adapté et de soutiens personnalisés. Pour cela, nous menons d’une part un travail de plaidoyer en profondeur, sur tous les sujets touchant au handicap et à tous les niveaux (grand public, responsables politiques ou économiques, médias, territoires, etc.), pour défendre le droit des personnes en situation de handicap et leur pleine participation à la société. D’autre part, nous proposons un accompagnement et des services aux personnes en situation de handicap et à leur entourage tout au long de leurs parcours, à travers une offre médico-sociale et sanitaire diversifiée et innovante, mais aussi à travers des actions associatives déployées dans toute la France, grâce à notre présence dans tous les départements, via nos délégations.

Concrètement, sur quels projets innovants, l’APF s’investit-elle actuellement ?

L’innovation a toujours fait partie des priorités de l’APF, et la thématique « Handicap et nouvelles technologies » sera d’ailleurs l’un des fils rouges du prochain Congrès de l’APF, en juin 2018 à Montpellier.

En matière d’habitat inclusif, nous avons été précurseurs, avec plus d’une quarantaine d’expérimentations mobilisant plus de 400 logements dans le parc social pour promouvoir des solutions nouvelles, à partir du droit commun, mais sécurisant l’accompagnement des personnes : projet de « foyer éclaté » à Combs-la-Ville en Seine-et-Marne, centre de ressources et d’expérimentation de la vie à domicile à Panazol près de Limoges, etc.

Sur le sujet de l’aide aux aidants, notre dispositif Repair’Aidants offre gratuitement un cycle de sensibilisations et formations sur une dizaine de thématiques relatives au vécu de ces aidants, mais aussi à des aspects techniques et pratiques de leur quotidien. Nous développons aussi des solutions de répit temporaire à domicile – le « balluchonnage » –dans plusieurs régions, afin de trouver le modèle qui répondra le mieux aux besoins des personnes.

Nous sommes également très investis sur la question de l’emploi, un facteur clé de vie sociale inclusive pour des personnes en situation de handicap. Nous repensons notre modèle et nos modes d’action, pour l’accompagnement des entreprises du milieu dit ordinaire comme pour le secteur des entreprises adaptées (EA) et des entreprises et services d’aide par le travail (ESAT), afin de nous adapter aux évolutions fortes du cadre législatif et financier et, in fine, favoriser la création d’emplois durables pour les travailleurs handicapés. Sur la formation, nous voulons préparer les jeunes à des métiers d’avenir. Ainsi, notre institut d’éducation motrice (IEM) de Liévin a lancé une formation dédiée au télépilotage de drones.

Dernier exemple de champ d’innovation que nous explorons : la télémédecine et la e-santé. Notre IEM de Noisy-le-Grand a mis en place une téléconsultation, en collaboration avec les services de neuro-pédiatrie de 5 hôpitaux de l’AP-HP, qui a démontré sa valeur ajoutée pour les enfants polyhandicapés accueillis par cet établissement.

Selon-vous, comment l’APF peut, avec ce réseau d’acteurs que constitue le CCAH, contribuer à la diffusion de cette innovation sociale ?

Le soutien du CCAH et de ses membres est essentiel pour l’APF. Sur le plan financier, nos actions associatives et un certain nombre d’expérimentations dans le champ médico-social reposent exclusivement sur la générosité du grand public et de nos partenaires, car elles ne rentrent pas dans les dispositifs de financement des Agences régionales de Santé ou des Conseils départementaux. Mais au-delà des subventions, nous voyons le CCAH comme un partenaire pour capitaliser sur les projets et expériences que nous menons, pour partager les leçons apprises avec d’autres acteurs du handicap, pour renforcer notre plaidoyer autour de dispositifs qui ont fait leurs preuves afin de les généraliser voire d’assurer leur prise en charge financière par l’Etat. Notre collaboration autour de l’habitat inclusif va dans ce sens. Le colloque que nous préparons autour de la transition numérique de notre offre médico-sociale pourrait être une autre belle opportunité.